Institutrices, soeurs laïques de la république ?

«Je croyais que l'institutrice était un peu comme la religieuse», écrit ce père de famille d'Orcet (Puy-de-Dôme) en 1903. Il se veut ardent républicain et il applaudit à la fermeture de l'école du couvent de sa commune. Mais pour lui l'institutrice laïque, prières et catéchisme en moins, doit ressembler à sa rivale d'hier: l'austérité de sa conduite, de son vêtement, le dévouement de tous les instants que permet son célibat, son esprit d'obéissance envers ses supérieurs doivent faire de cette «demoiselle» quelque chose comme une «soeur laïque». Il est très déçu par celle qui vient ouvrir la nouvelle école laïque de filles du village. Elle laisse tomber ses cheveux sur le front et se promène le soir avec des célibataires. C'est le scandale auquel M. l'inspecteur d'académie et M. le préfet doivent mettre fin. L'institutrice de la «Belle Epoque» participe officiellement à une oeuvre d'émancipation, mais que de tutelles pèsent sur elle! L'inspecteur primaire, le maire, le député, les «comités républicains», les parents la surveillent, l'encadrent et la corsètent à qui mieux mieux. Les douze vies d'institutrices de ce recueil montrent comment ces femmes ont subi cette dépendance ou comment elles ont essayé de s'en affranchir.