Chirac ou la victoire en pleurant

«Jacques, allez-vous battre Le Pen ?» Le 21 avril au soir, Bernadette Chirac interroge son mari. Elle est, comme toute la France, abasourdie.

Eliminé, Lionel Jospin décide de tirer un trait sur trente ans de vie politique. En descendant l'escalier de l'Atelier, son siège de campagne, «l'austère» pleure.

La France est en état de choc, le monde politique s'interroge. Le 22 avril, François Bayrou prévient Jacques Chirac : «Tu ne pourras pas gouverner la France, ça finira mal.»

Personne n'avait voulu imaginer ce véritable séisme. Seul, Jean-Marie Le Pen construisait méthodiquement un scénario qu'aucun sondage n'avait prévu.

Le climat d'insécurité grandissant, la persistance du mécontentement social ou encore l'éparpillement de la gauche plurielle auraient dû alerter Lionel Jospin. Mais il était trop obnubilé par sa cohabitation au sommet de l'Etat avec Jacques Chirac, trop empêtré dans la gestion quotidienne de Matignon.

Entre les deux hommes, les relations, au cours de ces cinq ans, sont passées de l'amabilité obligée à l'exaspération extrême. Si, pour Jacques Chirac, «Jospin n'est pas un homme d'Etat et ne peut pas être président», le Premier ministre confie la veille du premier tour : «Dans un autre pays, il y aurait eu un impeachment et Chirac serait en prison. Il a précipité la fonction présidentielle dans l'abîme.»

A travers une foule d'informations inédites, de réflexions et de témoignages recueillis parmi les candidats et leurs proches, au cours d'une enquête approfondie de deux ans, l'auteur dévoile les secrets de «la victoire en pleurant» de Jacques Chirac.