Deuils blancs

« Au moment où j'ai vu le garde-frontière, debout parmi ces pauvres diables, je lui ai tendu ma gnôle ! Et Dieu ! J'ai bien cru qu'il allait la boire cul sec tant le spectacle l'avait desséché comme du gros sel. J'ai dû le tirer par la manche pour qu'il se ressaisisse. Il n'a pas dit un mot, à cause de tous ces malheureux qui étaient descendus du train pour aller comme ça... mourir en pleine nuit dans les bois... »

Le témoin se prend la tête entre les mains. Il ne relève pas les yeux, comme s'il avait conscience qu'il garderait le souvenir de ce drame à tout jamais. Le chef de la police l'accompagne jusqu'à la salle d'attente où se trouve son épouse. Elle et lui se serrent dans les bras. De même corpulence, ils paraissent réunir en une seule étreinte toutes leurs années de vie commune. Le commissaire, ému, s'éloigne.

Trente-sept personnes viennent d'être retrouvées mortes dans les bois, à quelques dizaines de kilomètres de la frontière franco- suisse.

L'enquête est confiée à la police de Bourg-en-Bresse, déjà fort occupée par une autre affaire inquiétante : la disparition d'une adolescente la veille au soir.

Mais le sort n'a pas fini de s'acharner sur la région : dans les heures qui suivent, le commissaire Noël Lamarque apprend l'assassinat de son adjoint. Bouleversé et en manque d'effectifs, il appelle un ancien collègue en renfort. Cet inspecteur parisien n'est pas un inconnu pour les gens du pays. Il y a en réalité passé toute son enfance. À son retour, il se voit confronté aux souvenirs douloureux de son passé.

Marie-José Imsand s'est très librement inspirée de circonstances vécues pour écrire son premier polar dans lequel la magie des lieux et des âmes se mêle subtilement à l'énigme : un train bloqué en pleine campagne, un drame sur la voie, des voyageurs réunis par le hasard. Puis la nuit tombe, un hôtel mystérieux au loin, et l'imagination de l'écrivaine s'empare de l'extraordinaire afin d'en faire un récit où de multiples destins se rejoignent, pour un moment ou l'éternité.